L’isolement social est bien plus qu’une notion abstraite : il désigne l’état d’une personne insuffisamment entourée, ressentant un manque de contacts réguliers et de soutien. Selon l’Observatoire de la Fondation de France, 10 % des Français allaient, en 2022, jusqu’à se déclarer sans aucun réseau social significatif. En région Auvergne-Rhône-Alpes, la géographie même du territoire – alternance de grandes agglomérations et de zones rurales ou montagneuses – accentue des situations particulièrement aiguës.
Les répercussions sur la santé sont majeures : mourir plus tôt, développer davantage de maladies chroniques, accéder plus tardivement aux soins, voilà le triptyque sombre que dessinent de nombreuses études, dont celles menées par Santé publique France. Mais pourquoi et comment l’isolement social pèse-t-il à ce point sur la santé des habitants de la région ?
Il importe de distinguer :
Les deux dimensions interagissent, mais c’est souvent l’isolement objectif qui se traduit par les inégalités de santé les plus fortes (Drees, 2022).
L’isolement social n’est jamais la cause unique d’une mauvaise santé ; il en est cependant un facteur aggravant et accélérateur, en interaction avec de nombreux autres déterminants. En Auvergne-Rhône-Alpes, régionaliser le constat permet de cerner des disparités internes frappantes.
Documenté depuis plus de 30 ans, l’impact de la solitude sur la santé s’explique par différentes logiques complémentaires :
En région, la part des plus de 75 ans vivant seuls atteint 28 % (Insee 2023). Or, les chutes non détectées, la dénutrition, les syndromes dépressifs restent fréquents et insuffisamment repérés. L’étude « Vieillir en Auvergne-Rhône-Alpes » menée par l’ORS RA en 2021 estime que dans certains territoires, près de 50 % des aînés isolés n’avaient pas vu de professionnel de santé depuis plus de 6 mois.
Si la solitude des personnes âgées attire l’attention, celle des jeunes est plus discrète mais en forte augmentation. Selon une enquête du Conseil régional des jeunes, 1 étudiant lyonnais sur 5 se dit « seul toute la semaine ». La crise sanitaire de la Covid-19 a aggravé un mal-être latent, associant isolement, difficultés financières et retards de soins psychologiques (Mutualité Française AURA, 2022).
En 2020, l’Insee chiffre à 22 % la part de familles monoparentales à très faibles ressources en AURA. Le sentiment d’isolement, chez les mères ou pères solos, se traduit par un moindre accès au suivi gynécologique, à la santé bucco-dentaire des enfants ou à la vaccination (OBERSERVATOIRE régional de la pauvreté).
Certaines actions locales cherchent à briser ce cercle vicieux :
Des pistes se dessinent :
L’isolement social, loin d’être un épiphénomène, s’impose comme un déterminant de santé à part entière. En Auvergne-Rhône-Alpes, la diversité des territoires et la pluralité des statuts sociaux révèlent l’effet loupe qu’il exerce sur les inégalités de santé. Les initiatives régionales impliquant collectivités, associations, professionnels de santé mais aussi habitants eux-mêmes montrent la voie : resserrer les mailles du tissu social est un levier concret, mesurable, et indissociable de toute politique de réduction des inégalités. Pour demain, la question n’est plus tant de constater les liens entre isolement et santé que de les reconnaître à leur juste importance dans les outils de pilotage territorial, la formation, et l’organisation du soin.
| Source | Donnée/clé |
|---|---|
| Insee, 2023 | 28 % des 75 ans et plus vivent seuls en Auvergne-Rhône-Alpes |
| Santé Publique France, 2022 | Surmortalité de +23 % en 7 ans chez les aînés isolés |
| CPAM Rhône, 2022 | 45 % des sans-abris n’ont pas consulté de médecin dans l’année |
| ORS RA, 2021 | 50 % des aînés isolés sans contact médical semestriel dans certains territoires |
| Mutualité Française AURA, 2022 | 1 étudiant lyonnais sur 5 se dit isolé toute la semaine |