L’Auvergne-Rhône-Alpes, vaste et contrastée, conjugue grandes agglomérations – telles que Lyon, Grenoble ou Clermont-Ferrand – et territoires ruraux isolés comme le Cantal, la Haute-Loire ou une partie de la Drôme. Cette diversité géographique produit des inégalités de santé marquées, révélatrices de dynamiques territoriales profondes. Approcher la question des inégalités entre rural et urbain implique d’articuler données épidémiologiques, réalités vécues et initiatives locales spécifiques.
Avec ses plus de 8 millions d’habitants, Auvergne-Rhône-Alpes est la deuxième région la plus peuplée de France (source : INSEE, Bilan démographique 2022). Pourtant, le maillage démographique oppose deux mondes :
Les profils diffèrent sensiblement :
Même si Auvergne-Rhône-Alpes affiche une espérance de vie supérieure à la moyenne nationale (83,4 ans contre 82,2 ans pour la France selon l’INSEE 2022), ces moyennes masquent d’importantes disparités :
Un exemple dans le département de l’Allier montre que le taux de recours aux soins cardiologiques y est inférieur de 25% à la moyenne régionale, alors même que la mortalité cardiovasculaire y est supérieure de 20% (source : ARS ARA, Profil santé Allier 2021).
La question de l’accessibilité aux soins illustre le clivage entre rural et urbain :
Le schéma hospitalier régional, marqué par la fusion d’établissements et la rationalisation des plateaux techniques, concentre l’expertise dans les CHU (Lyon, Grenoble, Clermont-Ferrand), rendant l’offre de proximité parfois précaire en zones rurales. Entre 2000 et 2020, plus de 25 maternités ont fermé dans les zones intermédiaires et rurales (DREES, 2022), générant un surcroît de déplacements pour les familles, notamment en Ardèche et dans l’Allier.
Ce sont principalement les déterminants sociaux de la santé qui amplifient les écarts :
Le taux de suicide, révélateur du mal-être social, est 1,4 fois plus élevé dans les campagnes de l’Allier, du Cantal et de la Haute-Loire que dans les grandes villes régionales (source : Santé Publique France, Baromètre 2022).
La structuration des actions de prévention varie :
La santé mentale illustre la complémentarité et les limitations de chaque modèle territorial :
Des dispositifs tels que “Les Maisons des Adolescents itinérantes”, ou le réseau associatif des GEM (Groupes d’entraide Mutuelle), œuvrent au rapprochement de l’offre.
Les profils pathologiques divergent selon la zone :
Au-delà des constats, certaines dynamiques spécifiques à Auvergne-Rhône-Alpes méritent d’être soulignées :
Le succès de ces actions dépend de la capacité d’adaptation aux particularités de chaque territoire, du soutien aux professionnels, et de la reconnaissance du rôle des acteurs associatifs de terrain.
L’Auvergne-Rhône-Alpes illustre combien la lutte contre les inégalités de santé ne saurait se réduire à une simple opposition rural-urbain. Si chaque espace présente ses vulnérabilités propres (isolement et accès territorial vs. précarité sociale et densité en urbain), la clé réside dans la concertation des acteurs et l’innovation locale. Les solutions les plus efficientes émergent souvent du dialogue permanent entre professionnels de santé, institutions, élus et société civile.
Au fil des évolutions démographiques, des mutations économiques ou de l’évolution de l’offre médicale, seule une approche décloisonnée – s’inspirant des forces de chaque type de territoire – permettra de bâtir les outils d’une santé réellement équitable pour tous les habitants de la région.